RD Congo - A l'école du Stade Tata Raphaël

Publié le par Vieuxvan

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            Samedi 16 juillet 2011

 

L’événement du jour

 

L’article du jour

 

A l’école du Stade Tata Raphaël

 

Quand j’étais adolescent, ma distraction préférée était aussi mon sport favori, à savoir le football. J’en ai d’ailleurs gardé une séquelle puisque je me suis fracturé la jambe droite lorsque, à 13 ans, j’évoluais comme gardien de but chez les plus jeunes de notre école, le Collège Notre-Dame de Mbansa-Mboma.

 

Lorsque je revenais à Kinshasa pour les vacances de Noël, de Pâques ou les grandes vacances, en plus de jouer pour l’équipe de Cité Nicolas Cito (Kauka) ou celle de Dendale (Kasa-Vubu) – Christ-Roi, j’allais tous les dimanches assister aux matchs de football qui se jouaient au Stade Roi Beaudouin.

 

Sans me l’avouer, c’était aussi l’occasion de sortir de mon train-train habituel, de me faire des connaissances et aussi d’écouter de la belle musique. Chez-nous, à l’époque, mon cousin avait juste un appareil phonographique bon pour écouter les 78 tours.

 

Au Stade Roi Baudouin, j’entendais souvent les voix de Lucie Eyenga et de Joseph Kabasele dans notamment deux de leurs chansons : Nabanzaki chéri na ngai moko et Talela ngai na mwa gentil. En ce temps-là, je n’avais aucune connaissance du monde en dehors des leçons apprises au collège.  Comme je venais de Camp Cito, j’entrais toujours par la porte qui donne sur le « wenze » des Dragons, puis je contournais Moscou, regardant du haut du stade le quartier Immocongo ; enfin, je rejoignais notre fief, celui des Tupamaros, les fans de Daring Imana, matiti mabe, nzete ya bololo.

 

Cependant, la chanson qui m’a le plus marqué ce fut Pa’La Paloma. Collectionneur de chansons souvenirs à mes temps libres, je l’ai cherchée depuis longtemps sans la trouver. Je viens juste de la retrouver sur Youtube. J’ai été très enchanté. Je vous la fais écouter. Elle est de Celia Cruz. A l’époque, son nom m’était inconnu et, même au cours de ma carrière, je ne me suis jamais douté que c’était elle l’auteure de cette belle chanson :

 

YouTube - CELIA CRUZ - PA' LA PALOMA

 

Je vous ai déjà décrit l’ambiance qui régnait au Stade Roi Baudouin, rebaptisé Tata Raphael puis du 20-Mai. C’était à tout casser. J’aimais particulièrement la période d’attente des équipes sur le terrain. Il y avait toujours de l’électricité dans l’air et cette fébrilité mêlée de mysticisme. Toutes les équipes avaient des entraîneurs mais lorsqu’elles perdaient, ce n’était pas le coach qui était fautif. C’étaient les gars du laboratoire - entendez féticheur.

 

Avant l’entrée des joueurs d’Imana sur le terrain, on entendait trois salves. Puis, les joueurs sortaient par la porte en sous de la tribune d’honneur. Cela en ajoutait à l’ambiance mystique. Pour moi, qui allais passer deux semaines sur des 2 mois des grandes vacances chez mes parents au village, les coups de feu avaient un côté mystique. En dehors de la chasse, on ne les entendait que lors des cérémonies d’enterrement ou lors de certaines fêtes. 

 

La première impression est toujours la meilleure. Si j’ai opté sûrement pour les Vert-Blanc, c’est pour plusieurs raison :

 

  1. Le blanc immaculé signifiait la propreté
  2. Les joueurs étaient de beaux gosses
  3. Le jeu de l’équipe était époustouflant’

      4. La formation Elle était composée d’intellectuels anciens de l’ADAPES

          et Peres catholiques par opposition au FC Dragons, équipe des anciens

          des écoles des Frères des Ecoles chrétiennes et de V.Club, Bana Mbongo,

          club des commerçants portugais et angolais.

 

A cette époque-là, l’équipe, qui venait de bénéficier des enseignements de l’entraîneur belge Marcel Decorte, en mettait plein la vue à ses adversaires. Elle  avait un jeu qui s’appelait « Tourbillon » qui faisait baver les joueurs des autres équipes. La formation imanienne était composée de beaux gars comme Bopol Bonga-Bonga (Gonano), Max Mayunga (Rick Coppens), Gaston Nganga (Dafirma), Jules Balondo (Major), Androkwa, Ngelebeya (Englebert), Jules Ebumba (Piola/Tarzan), Miranda, Bowulu, Albert Mpase, le Belge Maertens (Muana Maria) et- bien sur mon idôle de jeunesse, le gardien Boniface Kibiasi alias René Vignal.

 

J’étais fou de cette équipe-là. Quand elle gagnait, j’exultais ; quand elle perdait, je versais des larmes. Aucune formation ne m’a autant impressionné que celle-là. Bonga-Bonga était un dribbleur et jongleur hors-cadre ; Mayunga excellait en amortis ; Nganga était spécialiste des feintes ; Balondo, bien que petit de taille, marquait souvent de la tête ; et Androkwa, lui, petit de taille aussi, c’est le gars qui surgissait de nulle part au moment propice. J’ai attribué une qualité particulière à chacun d’entre eux, mais en réalité l’entraîneur Decorte leur avait appris à tous comment faire des amortis, passes, talonnades, lobs, jongleries, couverture et autres trucs avec le ballon.

 

Malgré tous ces talents, l’équipe encaissait parfois des défaites crève-cœur. Dans les  autres équipes aussi, il y avait des joueurs émérites.

 

 

Dans V.Club, évoluaient Erumba, les deux frères Mondenge (Cherin)  et Enkoti ( De la Coco), Edouard Akwete, Albert Mayama (Braine), Nzeza Faustin (Mermans), Léon Lokombe, et surtout Assaka (Assassin) qui avait un tir foudroyant. Plus tard, je l’ai connu personnellement sur le chemin du travail ; on a sympathisé ; il m’a raconté qu’il était aussi un bon dribbleur des deux jambes, mais qu’il avait reçu la consigne de son entraîneur de ne dribbler qu’une seule fois avant de décrocher son tir foudroyant . L’effet de surprise faisait le reste.

 

Chez les Jaune et Or, les Dragons, il y avait les Raoul Lolinga, Remi Yamukanda,  Lucien Ndala, Jules Sumata (Bouguy), Léon Puati, Tandu (Souplesse) et autres. Il y en a dont les noms m’échappent en ce moment.

 

Bref, le football, c’était ce qui à la fois unissait et divisait les Kinois. N’oublions cependant pas que dans les années 56-59, nous n’avions pas la télé et que nous n’étions pas encore indépendants.

 

En 1960- 1961 l’African-Jazz de Kallé Jeff était maître de la ville grâce à ses chansons inspirées de rythmes cubains. J’étais en classe de Poésie au Collège Albert 1er (Boboto) et j’allais souvent jouer les « ngembo » dans les bars-dancings où il se produisait (Congo-Bar, La Cubana, Vis-à-vis, Petit Bois, Restaurant du Zoo, etc.) Je viens justement de retrouver, grâce à Youtube, des chansons cubaines que « copiaient » notre regretté Grand Kallé et ses ouailles, dont Tabu Rochereau (auteur) le trompettiste Willy Mbembe. Voici l’origine de la chanson Anishai.

La Sonora Matancera con Celia Cruz - Caramelo

 

Il paraît que Franco, devenu ami du président Mobutu, profita du recours à l’authenticité pour dénigrer Kabasele et faire taire l’African Jazz puisque désormais il n’était plus question de jouer de la musique étrangère. La musique cubaine était particulièrement visée, Fidel Castro s’étant déclaré ennemi juré des Etats-Unis et de leurs alliés.

 

Je me demande si toutes les chansons étrangères étaient interdites au Stade Tata Raphael.  J’en ai entendu bien d’autres en promotion dont Macumba d »Eboa Lottin et celle-ci de Coupé Cloué :

Coupe Cloue-mon konpè-Haitian music

 

Pour en revenir au foot, je n’ai jamais raté un seul match de Daring et j’assistais presqu’à tous les entraînements.

 

Dans les années 60, j’ai été éloigné, malgré moi, pour des raisons professionnelles, du Stade et des terrains des parcs alentour, mais dès qu’une occasion se présentait, je la saisissais. J’ai même suivi l’équipe deux fois lorsqu’elle se déplaçait à Mbanza-Ngungu pour y affronter des équipes locales, notamment lorsque Kidumu,  Mayanga et Pembele Ngunza, trois follets convoités de part et d’autre par les trois grandes formations.

 

 

 

 

Mes autres souvenirs du Stade Tata Raphael, je les ai livrés dans d’autres articles auparavant. Beaucoup d’entre eux remontent à l’époque des mes années à Télé-Zaïre. Je n’étais plus spectateur mai acteur de par mes responsabilités professionnelles: les célèbres rassemblements populaires du président Mobutu, de grands événements tel le combat du siècle Mohammed Ali vs George Foreman, les combats de boxe de Mamba Shako et Betshika, les matchs continentaux et internationaux, les grands concerts tel celui de James Brown, et j’en passe.

 

Revenons-en au football. J’étais au courant des transferts de nos meilleurs joueurs dans les équipes européennes depuis Leon Mukuna (Trouet) jusqu'à Santos Muntubile, en passant les Kialunda, Mahungu et autres. J’ai connu toutes les éditions de nos équipes de Kinshasa et les grandes formations du pays dont Englebert (Mazembe), Sanga-Balende, St-Eloi (Lupopo) sans oublier les teams nationaux de toutes les époques tant les Lions que les Léopards.

 

Je voulais surtout aujourd’hui revenir sur les chansons souvenirs qui m’ont marqué en assistant aux derbys qui se déroulaient dans ce stade et aussi sur le fait que le foot était un lieu de rencontres où se sont tissé bien des relations d’amitié et d’affaires tout au long de notre histoire. Des leaders politiques, des gens d’affaires et même les enfants du président Mobutu s’y impliquaient pour ne pas dire le président lui-même.

 

Tout cela est loin désormais. Aujourd’hui, mon sport préféré est le hockey sur glace, suivi du tennis. Je suis quand même tous les autres sports aussi : baseball, basket-ball, cyclisme, athlétisme, football américain et autres.

 

En tout cas, mes doux souvenirs d’adolescent, je les dois entre autres au Stade Tata Raphaël. Comme quoi, l’école parallèle, ce n’est pas un vain mot.

 

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La pensée du jour

 

Si vous craignez les morsures d’insectes

Choisissez-vous un autre métier que celui d’agriculteur

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À demain !

Rose Laurens - AFRICA-

 

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